Développement Durable / Environnement
Economisons l'eau de la nappe du Champigny
Publié le
La nappe des calcaires de Champigny est un patrimoine naturel régional et une ressource stratégique pour l’approvisionnement en eau potable (AEP) d’un million de franciliens. Elle est aussi prélevée par une quinzaine d’industriels et 84 exploitants agricoles.
En ce début d'année 2023, face au manque de pluie, il est temps pour chacun d'économiser l'eau de la nappe du Champigny.
Pas de pluie sur la Brie
Ce n’est pas un scoop, il a peu plu sur la Brie cet hiver. Après des pluies inférieures à la normale entre novembre et janvier, il n’est pas tombé une goutte d’eau en février sur la partie Ouest du territoire et seulement quelques millimètres sur la partie Est !
Des sols qui s’assèchent
Conséquence la plus visible, c’est l’état de sécheresse des sols, qui est particulièrement préoccupant pour le bassin parisien. C’est donc problématique pour les cultures d’hiver qui ont du mal à pousser et à mobiliser l’azote pourtant présent dans les sols, et pour les cultures de printemps qui n’ont pas encore pu être implantées. Les prochains millimètres de pluie leur bénéficieront.
La nappe ne s’est pas rechargée
Pour la nappe du Champigny, il n’y a eu cet hiver aucun signe de remontée de son niveau, ou furtif et très localisé. Et le niveau va continuer à baisser jusqu’à l’hiver prochain. Les hydrogéologues sont catégoriques : sur les 44 ans de suivi du niveau de la nappe du Champigny, il est très rare qu’elle commence à se recharger après le mois de février. Les pluies de printemps et d’été seront interceptées par les plantes et le sol. Sauf pluies exceptionnelles, comme en juin 2016, les pluies à venir ont très peu de probabilité de recharger la nappe. C’est donc une année 2023 très tendue pour la nappe. Chacun va devoir collectivement vivre sur les stocks et faire dès à présent toutes les économies et les arbitrages possibles.
Un niveau de nappe plus préoccupant à l’Est
Deux piézomètres servent de référence pour suivre le niveau de la nappe du Champigny sur 2600 km² et déclencher des mesures de restriction si le niveau passe sous les seuils d’alerte (en jaune et orange sur les graphiques ci-après) puis de crise (en rouge) : à l’Ouest du territoire à Montereau-sur-le-Jard, et à l’Est, à Saint-Martin-Chennetron. Il y a 2 secteurs parce que les contextes Ouest et Est sont très différents à la fois par la géologie et par les usages de la nappe. D’ailleurs, les situations sont bien différentes en 2023.
Sur la zone Est, le niveau de la nappe est déjà passé sous le seuil de vigilance, et sans recharge, devrait atteindre le seuil d’alerte début avril. Des restrictions d’usage devraient alors être annoncées par le Préfet, comme l’interdiction d’arrosage des pelouses, espaces verts, terrains de sports ou potagers. Qui utilise l’eau de la nappe dans ce secteur et est concerné par ces économies ? Les communes qui ont encore un forage ou sont alimentées par un forage de la zone et leurs habitants, les irrigants et les gestionnaires des réseaux d’eau potable.
Compte tenu de la structure géologique de la nappe, il faut savoir que les restrictions n’empêcheront pas à elles seules que le niveau baisse, en revanche elles retarderont l’atteinte du seuil de crise. D’autant qu’on ne sait pas de quoi sera fait l’hiver suivant ! L’objectif de toutes les économies doit être de retarder le phénomène en limitant autant que possible les pompages dans la nappe, et ce dès à présent. Il faut donc agir maintenant.
Le secteur Ouest de la nappe a fait l’objet dès 2005 d’une concertation menée par AQUI’ Brie avec tous les usagers de la nappe, parce qu’elle est très sollicitée pour l’AEP et a connu des périodes de crise. Avec l’appui d’un modèle mathématique, les usagers ont testé différents modes de gestion de la nappe. Au terme de cette étude, le secteur a été classé dès 2009 en Zone de Répartition des Eaux, les pompages plafonnés, et pour les plus gros, revus à la baisse. Cette gestion quantitative a permis année après année de faire remonter le niveau d’environ 1,3 mètre au-dessus du seuil de vigilance.
Cette tranche d’eau, capitalisée sur le long terme, devrait permettre de tenir le coup en 2023 sans restriction. Mais ici non plus, on ne sait pas de quoi sera fait l’hiver prochain ! Donc même s’il n’y a pas d’obligation règlementaire à réduire les pompages, il faut que tous les usagers de la nappe mettent tout en oeuvre pour économiser l’eau !
Après un été sec, on connait un hiver très sec, et rien ne dit qu’on ne va pas encore connaitre un été puis un hiver sec. Sur les 44 ans de données disponibles à la station Météo-France de Melun-Villaroche, il y a déjà eu plusieurs hivers déficitaires en eau, par exemple sur la période 1989-1992. Et il est à craindre que ces phénomènes seront amplifiés et plus fréquents à l’avenir à cause du dérèglement climatique.
Que l’hiver 2023 soit le déclic pour anticiper 2060 !
Depuis 2001, AQUI’ Brie développe des solutions pour protéger la nappe sur le temps long : accompagnement depuis 20 ans des 221 communes du territoire vers l’abandon des pesticides, végétalisation et renaturation des espaces (trottoirs, gare, cimetière...), solutions fondées sur la nature, gestion quantitative du secteur ouest. En 2020, AQUI’ Brie a lancé le projet #Champigny2060, pour co-construire avec les acteurs du territoire des solutions d’adaptation pour la nappe du Champigny au climat de 2060. De la réutilisation des eaux usées traitées aux retenues d’eau de drainage, en passant par les économies d’eau grâce aux Outils d’Aide à la Décision en irrigation ou à des variétés de cultures adaptées aux aléas, les participants à #Champigny2060, cherchent et évaluent des solutions locales adaptées.
Depuis plus de 30 ans, les experts du GIEC nous alertent sur les conséquences du dérèglement climatique dans notre vie quotidienne. Cette fois-ci, on y est. En 2023, sur le territoire de la nappe du Champigny, nous risquons d’en arriver aux conflits d’usage, entre approvisionnement en eau potable et irrigation des cultures, entre eau pour les seine-et-marnais et pour les autres franciliens, entre production de gaz et production alimentaire. La raréfaction de la ressource en eau impose de réfléchir à la sobriété dans tous les secteurs et à la répartition de l’eau entre les usages. Pour passer le cap de 2023, il faut agir cette année, et pérenniser ces actions sur le long-terme, car ces événements climatiques vont se reproduire plus souvent.
Pour en savoir plus : www.aquibrie.fr
J'ai mon mot à dire
Réagissez aux informations de cette page.
Nous vous répondrons.